Instituée par le pape François et fixée au 33e dimanche du temps ordinaire, la septième édition de la Journée mondiale des pauvres a eu lieu ce dimanche 19 novembre 2023 en l’église Saint-Maimboeuf à Montbéliard. Pour le Pape, « c’est une journée qui aide les communautés et chaque baptisé à réfléchir sur la manière dont la pauvreté est au cœur de l’Évangile et sur le fait que, tant que Lazare git à la porte de notre maison (cf. Lc 16,19-21), il ne pourra y avoir de justice ni de paix sociale. »
Photos et homélie de Mgr Denis Jachiet
Dans l’histoire que raconte Jésus, qu’est-ce qu’un talent ? Une qualité, une aptitude, un don ? Non c’est de l’argent ! Dans l’antiquité, le talent est une unité monétaire considérable de 400 000€. Celui qui reçoit 5 talents est à la tête de 2 millions. Quand il rapporte 10 talents, c’est-à-dire quatre millions, il s’entend dire : « Bon serviteur tu as été fidèle pour peu de choses ». Pour le maître dans cette histoire, l’argent, même énormément d’argent, c’est peu de choses. Il y a pour lui des réalités tellement plus importantes que cela.
Demandons-nous : Qu’est-ce que ce que Jésus veut confier à ses amis fidèles ? Et comment chacun peut-il multiplier et fructifier les biens de Dieu dans sa vie ? Quelle place est donnés aux pauvres ?
L’économie des dons spirituels
« A celui qui a on donnera encore… celui qui n’a rien se verra enlever même ce qu’il a ». C’est choquant ! Pensez au scandale d’un dessert mal partagé entre des enfants : c’est pas juste !
Le talent d’argent de la parabole ne désigne pas quelque chose de matériel qui se divise en parts égales, il représente un don reçu d’en haut, une grâce intérieure que le Seigneur nous confie.
- Il y a celui qui sait accueillir, bras ouverts, sourire aux lèvres, il a tout son temps pour vous !
- Il y a celui qui est prêt à tout partager : son pain, son logement, son argent, même sa chemise !
- Il y a celui qui sait apaiser les colères, réconcilier les ennemis, conduire au pardon et à la paix !
- Il y a celui qui sait dire ce que Dieu fait en lui et qui sait inviter à aimer Jésus et à le suivre !
- Il y a celui qu’il sait écouter le fond du cœur de l’autre et devant le Seigneur prier pour lui !
Qu’est-ce qu’il y a comme talents au milieu de notre assemblée ! Tous ici nous sommes bien plus que millionnaires, nous sommes détenteurs de dons de Dieu à partager et à fructifier.
« A celui qui a on donnera encore » Dieu nous veut riches des dons de l’Esprit et des talents d’amour qu’il nous a confiés.Un don spirituel ne se met pas dans un coffre. Il doit être reçu, mis en œuvre, utilisé pour le bien des autres et pour la joie de Dieu. Ignoré, inutilisé, enterré, le bien spirituel perd sa valeur. Accueilli dans l’action de grâce, le partage, la communion et le service il se multiplie. Notre vie spirituelle s’étouffe dans la peur et le choix permanent de rester en sécurité. Il m’est arrivé d’avoir peur quand Dieu m’appelait à faire des choses difficiles. J’ai trouvé la force de ne pas enterrer ses appels au fond de mon cœur parce que j’ai prié et à chaque fois il m’a encouragé. Déterrons les dons de Dieu pour les risquer au grand jour les investir au service du prochain !
Imiter la femme parfaite
A la dernière page du livre des Proverbes est présentée une figure féminine étonnante et merveilleuse : la femme parfaite. On veut la voir. On imagine son visage, ses cheveux, les formes de son corps, son charme et son sourire… Le texte ne nous parle que de ses mains, de ses doigts !
On les voit trier la laine et le lin, tenir la quenouille et le fuseau. Elle fabrique des fibres, les tisse, les assemble, confectionne des vêtements. Cette femme parfaite a l’air d’une filandière, d’une tisseuse et d’une couturière hors pair. Elle tisse des vêtements pour tous les siens. Sa perfection n’est pas le charme ni la beauté, c’est le travail de ses mains qui rend les siens bien habillés et bien protégés du froid.
Active et productrice d’étoffes et de vêtements, elle est attentive et généreuse envers les pauvres. Elle leur donne le nécessaire et la dignité.
Cette femme est proche du Seigneur et fait sa volonté. Elle ne cesse de tisser des liens. Et si cette perfection était celle de l’humanité dans le regard de Dieu ? Elle a tous les dons nécessaires à la vie d’une communauté chrétienne ! Cette femme c’est l’Eglise, le diocèse, la paroisse. En elle tous les dons sont nécessaires, tous les biens spirituels viennent se compléter et se déployer. Elle est le modèle de sagesse de toute communauté de disciples de Jésus. On la reconnaît à ses mains car ce sont les actes qui attestent la vérité de l’annonce de l’Évangile.
Voici ce que la femme parfaite nous invite à imiter. Se mettre au service, ouvrir son cœur à temps et à contretemps, savoir se mettre en avant quand il le faut et se retirer pour laisser un autre à sa place. Donner gratuitement et pardonner de bon cœur. Donner de la place aux plus pauvres. Prier sans cesse, agir pour le bien, sans réclamer le succès ou la récompense.
Tisser sans cesse la communion et la charité.
Découvrir et partager le don du pauvre
Y a-t-il vraiment une place et un rôle pour chacun ? Dans nos communautés, ne faut-il pas rechercher les compétences, utiliser les qualifications ? Et le Pauvre ? La personne malade ou handicapée, le migrant ou le SdF, la personne isolée ou fragile, où est leur don, leur mission ?
Dans la vie de l’Église chacun est nécessaire, le pauvre doit y être reçu et être mis devant comme il est à la première place dans les béatitudes. Sa présence est un signe de celle du Christ. S’il est reçu en vérité, il devient un appel, un stimulant de vie chrétienne. Il nous dévoile notre cœur et les dons spirituels qui y sommeillent. Allons à lui gratuitement pour qu’en lui Dieu nous parle.
Que de talents ont prospéré dans la vie des saints ! Ils ont donné tout ce qu’ils recevaient en fait prospérer la vitalité spirituelle de l’Église. Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus a écrit : « Entrons dans la confiance (…) Nous trouverons notre talent et oserons le déterrer et le multiplier. J’ai compris que la charité ne doit point rester enfermée dans le fond du cœur. (…) Il me semble que ce flambeau représente la charité qui doit éclairer, réjouir, non seulement ceux qui me sont les plus chers, mais tous ceux qui sont dans la maison, sans excepter personne »
« Dans cette maison qu’est le monde, tous ont le droit d’être éclairés par la charité, personne ne peut en être privé. Que la ténacité de l’amour de sainte Thérèse inspire nos cœurs en cette Journée Mondiale, qu’elle nous aide à “ne pas détourner notre regard du pauvre” et à le maintenir toujours fixé sur le visage humain et divin du Seigneur Jésus-Christ. » (Pape François message 7e journée mondiale des pauvres 19/11/23).