« Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle » (Jn 6, 60-69)
La difficulté d’aujourd’hui est la même qu’au temps de Jésus : Jésus la diagnostique en disant « mes paroles vous scandalisent ». Tous les prophètes choquent, quand ils disent les exigences d’un amour réel. L’Église sera toujours un corps étranger qui subit le rejet et soulève les protestations. On comprend que soit mal reçue une Église qui, parce qu’elle croit que c’est la sagesse, annonce la nécessité de faire passer l’homme avant la finance, l’avantage de l’autre avant son propre avantage, qui demande de pardonner, de se faire serviteur, de se convertir…
Prédication du père Louis Groslambert pour le vingt-et-unième dimanche du temps ordinaire
Il est sans doute indispensable de revenir sur la 2ème lecture. Six mots ont fait sursauter toutes les dames et quasi tous les messieurs : « femmes, soyez soumises à votre mari ». Ces six mots font forcément problème : alors que l’homme et la femme ont la même dignité, on ne comprend pas cette exhortation faite à la femme d’être soumise à son mari.
Épouses et maris ici présents, si vous vous êtes sans doute mariés à l’Église, c’est qu’à votre avis la bonne manière d’aimer est celle de Jésus. La bonne manière d’aimer était figurée par la croix qui montrait qu’en donnant sa vie pour l’humanité, le Christ l’a considérée comme plus importante que lui-même : voilà le sens qu’il faut donner à l’expression « être soumis ». N’êtes-vous pas bouleversés en pensant que, lorsqu’il vous lave les pieds et qu’il meurt pour vous, le Christ vous dit « tu es plus important que moi » ? Paul, lui, était bouleversé : « le Christ m’a aimé et s’est livré pour moi qui étais pécheur », autrement dit, il m’a considéré comme plus important que lui, c’est-à-dire qu’il s’est mis en dessous, il s’est soumis à moi.
Et maintenant, épouses et époux, regardez vos alliances. Elles portent votre engagement à considérer que votre conjoint est plus important que vous-mêmes ; elles sont le rappel que vous êtes prêts à mourir l’un pour l’autre. (Saint Paul le dit clairement : « vous les hommes, aimez votre femme à l’exemple du Christ qui a donné sa vie pour l’Église »). La soumission que demande Paul consiste à tout faire pour la personne qui nous donne son amour. Vous dites sûrement comme saint Paul que cette soumission est l’attitude normale dans les relations entre époux : chacun se met au service de l’autre et considère l’autre comme plus important que lui-même ; et cette soumission là ne dévalorise ni l’épouse ni l’époux, au contraire. Merci à vous, les époux : puisque chacun de vous considère l’autre comme plus important que soi, vous rendez visible l’amour dont le Christ aime l’Église ; vous ne vous contentez pas de respecter un contrat juridique, vous donnez votre vie pour votre conjoint. Quand saint Paul dit que l’épouse doit être soumise à son mari, il ne vante pas le machisme, mais d’élan d’amour, de service mutuel. Et puis, st Paul ne parle pas de cette soumission d’amour seulement pour décrire l’amour dans les couples, mais pour dire l’amour dans la communauté : « par respect pour le Christ, soyez soumis les uns aux autres ». La règle fondamentale dans les couples devrait être la règle fondamentale entre tous les paroissiens !
Parlons maintenant de l’évangile : Vous avez entendu ? Quand Jésus fait l’homélie, la réaction des gens est de s’écrier : « ce qu’il dit est intolérable » et beaucoup lui tournent le dos. Ils étaient 5000 hommes à acclamer Jésus après la multiplication des pains, il n’en reste quasi que 12. Jésus leur dit avec son infini souci de liberté : « voulez-vous partir vous aussi ? ». Tirons une première conclusion : si nos contemporains tournent le dos à l’évangile et à la messe, ce n’est pas parce que les catéchistes sont mauvais ou que les homélies sont nulles ; en effet, quand le catéchisme est fait par Jésus, le meilleur catéchiste, les gens lui tournent le dos.
La difficulté d’aujourd’hui est la même qu’au temps de Jésus : Jésus la diagnostique en disant « mes paroles vous scandalisent ». Tous les prophètes choquent, quand ils disent les exigences d’un amour réel, qu’ils demandent de renoncer aux réflexes égoïstes pour adopter la loi du don de soi ; ils choquent quand ils disent que la sagesse est de faire confiance ; l’homme formaté par les plaisirs et les loisirs est choqué quand on lui dit de prendre sa croix, de mourir à lui-même. Tirons une seconde conclusion : L’Église sera toujours un corps étranger qui subit le rejet et soulève les protestations. On comprend que soit mal reçue une Église qui, parce qu’elle croit que c’est la sagesse, annonce la nécessité de faire passer l’homme avant la finance, l’avantage de l’autre avant son propre avantage, qui demande de pardonner, de se faire serviteur, de se convertir…
Rendons grâce, car l’Esprit saint a donné à une part importante de l’humanité (le peuple immense des baptisés) de n’être pas heurtés par les exigences de l’évangile. Ils sont en effet innombrables ceux qui disent avec Pierre : « Je ne veux pas te quitter. Toi seul as donné ta vie pour moi ! toi seul me fais une confiance absolue en me donnant ma vocation ! toi seul avec ton amour, ton respect, ton pardon, ton sens de la justice…! Toi seul dis ce qui fait grandir l’homme, ce qui soude la famille humaine, ce qui conduit à la vie ». … A qui d’autre pourrais-je aller ?
Tirons une troisième conclusion : pour avoir la joie d’être soumis au Christ, il faut adapter notre vie à notre profession de foi. Nous ne pouvons pas dire à Jésus « je t’aime p’être bien que oui, p’être bien que non… à condition que ça ne me dérange pas trop ». Nous ne pouvons pas dire, lors de la nuit pascale : « je renonce à Satan », et continuer de pactiser avec ce qui déshumanise et asservit : l’égoïsme, la jalousie, l’injustice, la violence, le mensonge, la mort. Puisque qu’il n’y a que Jésus qui soit lumière, paix, joie, fidélité, vers qui d’autre irions-nous ? Professons la foi en celui hors de qui il n’y a pas de paix, sans qui il n’y a pas de joie, sans référence à qui, il n’y a pas de justice. JE CROIS EN DIEU……