Dans l’Évangile de ce dimanche, nous goûtons la manière dont Jésus parle des autres croyants qui entourent ses disciples. Savourons sa parole : « Celui qui n’est pas contre nous est pour nous ». Des gens qui ne partagent pas notre foi ont souvent une attitude parfaitement conforme à Jésus. Ce constat nous conduit à faire cette profession de foi : « Seigneur, ton Esprit Saint est vraiment libre comme le vent ; il souffle où il veut, chez les baptisés protestants et catholiques, chez les juifs, chez les musulmans ». Apprenons à contempler le Saint Esprit à l’œuvre en toute personne, apprenons à louer Dieu qui parle à tout homme de bonne volonté.
Prédication du père Louis Groslambert pour le vingt-sixième dimanche du temps ordinaire
Frères et sœurs, la première parole racontait comment l’Esprit a été donné à des gens qui n’étaient pas dans l’assemblée ; et l’évangile racontait qu’un homme chassait les démons – et faisait donc l’œuvre du Saint Esprit – sans faire partie des Douze. Ces deux cas semblables me conduisent à parler du Saint Esprit. Car certains parlent de lui en termes de privilèges, voire de monopole : les baptisés auraient la faculté de recevoir le Saint Esprit mieux que les non baptisés, et les évêques et les prêtres recevraient le Saint Esprit plus sûrement que les laïcs. Or, des baptisés qui ne sont ni évêques ni prêtres ont une sainteté incontestable ; votre curé est sûr que des fidèles de sa paroisse sont bien plus avancés en sainteté que lui, et vous constatez comme moi que des gens qui ne partagent pas notre foi ont une attitude parfaitement conforme à Jésus. Ce constat nous conduit à faire cette profession de foi : « Seigneur, ton Esprit Saint est vraiment libre comme le vent ; il souffle où il veut, chez les baptisés protestants et catholiques, chez les Juifs, chez les musulmans. » Frères et sœurs baptisés et confirmés, apprenons à contempler le Saint Esprit à l’œuvre en toute personne, apprenons à louer Dieu qui parle à tout homme, invitant celui-ci à faire la paix avec son voisin, suggérant à celui-là d’aider un frère qui a de la peine, et à cet autre de payer de sa personne pour les autres. Par le Saint Esprit, Dieu met sa loi d’amour en toute personne ; et toute personne se réjouit d’obéir à la loi d’amour. Autrement dit, le Royaume de Dieu – le royaume où Dieu répand l’esprit d’amour – est infiniment plus vaste que la communauté des baptisés.
Puisque, sans le savoir, des personnes portent le Saint Esprit, goûtons la manière dont Jésus parle des autres croyants qui entourent ses disciples ; savourons sa parole : « Celui qui n’est pas contre nous est pour nous ». Quelle bonne nouvelle ! ceux qui ne viennent pas à l’église peuvent porter quelque chose de l’Évangile à ceux à qui nous ne savons pas offrir l’Évangile ! Admirons le Saint Esprit : il sait mettre sur pied une évangélisation en dehors de l’Église, puisque, dit Jésus, ceux qui ne sont pas contre nous servent l’évangile ! Donc pas d’esprit de clocher, pas de monopole, pas de privilège, pas d’intolérance !
Voilà les réflexions qu’ont fait naître en moi la première lecture du Livre des Nombres et le début de l’évangile. J’ai parlé du regrettable réflexe qui fait parler en termes de privilège, c’est-à-dire d’exclusion. Je propose maintenant de nous attarder à ces paroles où Jésus met en garde les disciples : « n’entrainez pas la chute de quelqu’un, et supprimez ce qui vous entraine à chuter vous-mêmes », par exemple votre main, votre pied, votre œil, … à quoi nous pourrions ajouter, car ils peuvent nous conduire au péché : votre compte en banque, votre orgueil, votre paresse, votre tiédeur, votre habitude de spectacles dégradants etc… « Ce qui t’entraine au péché, coupe-le ! » C’est que la lutte contre l’esprit du mal est un combat qu’on ne peut livrer qu’avec des méthodes radicales. Il faut être vigilant, exigeant, intransigeant et n’accepter aucune compromission avec le mal.
Ça me fait penser à cet enseignement d’un moine d’Égypte dans les 1ers siècles. Il disait en substance : le démon est comme un chien enragé ; le Christ a déjà fait beaucoup pour nous épargner ses morsures : il a attaché la bête à une chaine ; elle pourrait donc encore nuire si l’homme s’approche d’elle ; mais, si l’homme ne s’approche pas d’elle, elle ne pourra plus le mordre. Autrement dit, si le Christ combat le mal, il ne nous dispense pas d’avoir un comportement préventif : notre conversion suppose que nous ne nous approchions pas de la bête enragée. Soyons les portiers de notre cœur, ne laissons pas entrer dans notre cœur les pensées perverses, les pensées opposées à la fraternité, les pensées opposées à la justice… Soyons les portiers de notre cœur ! Sachant que le Saint Esprit ne souhaite qu’une chose : nous aider à être les portiers de notre cœur.
« Seigneur, délivre-nous de tout mal » ; garde-nous de nous approcher de la bête !